Dans le chapitre consacré aux philosophes
anciens j’avais volontairement laissé de côté la théorie métaphysique d’Aristote
pour une raison simple : malgré sa grande influence sur les
théories des philosophes modernes, elle ne présente que peu d’intérêt eu égard
au but poursuivi ici, à savoir définir la Conscience.
Aristote disait : "L'âme n'est pas une variété du corps…, mais elle ne saurait être sans
un corps. L’âme n'est pas un corps, mais quelque chose qui appartient ou qui
est relatif à un corps."
En ce sens que l’âme étant la
"forme" et la matière le "corps physique", le sujet animé
est une forme plongée et engagée dans la matière comme toutes ses actions et
passions. Chacune a son côté formel (notion de forme) qui concerne l’âme, et son
côté matériel qui concerne le corps. Tout ceci me semble confus et n’aboutit
qu’à nous faire entrevoir un schéma simpliste de l’âme, entité incomplète qu’il
appela le "Noûs", donnant sa forme à la matière, moulant ainsi le
corps physique, mais ne pouvant être ni indépendante ni autonome.
Le fait est que c’est bien curieux qu’aucun
des philosophes anciens n’ait jamais défini la notion de conscience, ou même
tenté de le faire. Dans leurs enseignements, Ils ont tous tourné autour du pot,
la qualifiant de puissance et d’énergie, la confondant avec l’âme, un concept
religieux, mais sans jamais l’expliquer alors même qu’ils étaient prolixes dans
leurs descriptions de la matière. Ils ont tous simplement éludé la question de
la conscience comme si c’était un obstacle intellectuel insurmontable, comme si
c’était absurde de la poser.
Francis Bacon (1561-1626) et René Descartes
(1596-1650), sont généralement considérés comme têtes de liste des philosophes
modernes. Francis Bacon soutient que la philosophie a pour objets :
Dieu, l'homme et la nature, et de ce fait (dieu étant l’explication de tout) il
s’intéresse peu à la métaphasique et ne nous apporte rien dans cette quête que
nous poursuivant sur ce qu’est la conscience.
René Descartes, bien qu’ayant développé son discours de la
méthode en plagiant le soufisme du philosophe arabe El Ghazali, son ainé de
cinq siècle, a tout de même apporté à l’occident qui sortait à peine de la
barbarie du moyen âge, un début de construction épistémologique sur la théorie
de la connaissance et contrairement à Bacon, s’était intéressé à plusieurs
domaines scientifiques dont les mathématiques, la physique, la cosmologie et la
physiologie qui lui avait permis d’acquérir de bonnes connaissances en
anatomies animale et humaine. De là l'assise de sa notoriété.
Tous le 17ème siècle fut sous
l’influence du cartésianisme de René Descartes et de ses disciples,
Bossuet, Malebranche, Spinoza et Leibniz. Le Français Malebranche, le
Néerlandais Spinoza et l'Allemand Leibniz ont tous les trois poussé la théorie
philosophique de Descartes pour l'amener vers d'autres horizons que Descartes
lui-même n'avait probablement pas voulu explorer. Si le premier et le deuxième
se perdent dans des conjectures et dans des affirmations sur l'existence d'un
dieu unique, omniprésent et omnipotent , sans le moindre fondement
logique, se prenant parfois les pieds dans le tapis quand à l'existence d'un
libre arbitre qu'ils affirmaient par ailleurs, Leibniz ( 1646-1716), brillant
penseur allemand, francophone de surcroît, fut le premier des philosophes
modernes à accorder à l'âme/conscience le caractère d’une force intelligente et
autonome de dieu, et ce, contrairement à l'essence même de la théorie
cartésienne.
Leibniz disait qu’en chaque chose qui existe
dans l'univers il y a une force qui tend à penser et à agir. Ces forces sont
départagées selon le classique antagonisme du bien et du mal, comme c'est le
cas dans la religion Zoroastre des Perses ou encore dans
l'enseignement du philosophe Grec Empédocle d'Agrègent. Elle sont conscientes
d'elles-mêmes, y compris chez les animaux, et tendent à l'équilibre dans
l’univers, grâce à la coordination
bienveillante d'une force supérieure, celle de dieu qui "gère" le
tout (bien et mal) en aimant et en préservant ses créatures, les hommes et les
animaux.
Par l'affirmation de l'existence d'une
conscience autonome de la pensée de dieu et libre de ses propres décisions, la
philosophie de Leibniz lui valu de se distinguer parmi ses pairs disciples d'un
cartésianisme poussé dans ses derniers retranchements, mais en affirmant que "
Tout ce qui existe et tout ce qui se
passe est forcément le mieux possible, parce que c’est Dieu qui l’a voulu et
qu’il ne se trompe pas.", il a également subi les railleries d'un
Voltaire (dans Candide) moqueur de son optimisme et de sa naïve théodicée, mais gagné le secours inattendu d'un Victor Hugo, lui même convaincu que dieu
existe et qu'il est bon, dans ces vers restés célèbres :
"Oui
peut-être au delà de la sphère des nues,
Au
sein de cet azur immobile et dormant,
Peut-être
faites-vous des choses inconnues
Où
la douleur de l'homme entre comme élément."
John Locke (1632 – 1704) est venu apporter une touche
anglaise critiquant l’excès de dogmatisme dans la théorie de Descartes. Dans
son "Essay concerning Human Understanding" publié en 1890, le
"Voltaire” Anglais, nous fait part de sa théorie métaphysique, assez
originale pour son époque mais qui constitue tout de même une curieuse
combinaison entre l’idéalisme Kantien
et le soufisme d’Al- Ghazali.
Pour lui, l'univers se compose de Dieu, de l'immortelle
âme pensante, et de la matière physique qui n’est qu’une extension de la pensée
de dieu. Comprenez par là que la pensée
de dieu, énergie par essence, amalgame les atomes pour créer la matière, et
c’est ainsi que dieu se trouve présent dans toute création qu’elle soit
minérale, végétale ou animale.
La perception que nous avons nous de cette
matière physique est entièrement réduite aux sensations directement transmises
par elle à nos esprits à travers nos cinq sens. Cependant John Locke admet que les qualités primaires que l’on attribue
à la matière (densité, solidité, opacité…,) lui soient intrinsèques et
existeraient en dehors de toute observation consciente.
En revanche les qualités secondaires telles que les couleurs, les
sons émis ou le goût, relèveraient, d’après lui, de l’observateur lui-même. Dans
un univers sans systèmes auditifs pour entendre ni de
cerveaux pour analyser ce que l’on entend, il n'y aurait
pas de sons, ni même de couleurs d'ailleurs, en
l’absence même de ce système sophistiqué qu’est la vue, soutient le Voltaire Anglais. Si toute conscience venait à disparaître de
l'Univers, il n’y
aurait désormais plus de rouge ni
de bleu, plus de chaud ou froid,
mais les choses allaient encore être grandes ou petites, rondes ou carrées,
solides ou fluides, que l’observateur soit là pour en être
conscient ou non.
Il en conclue donc que les qualités secondaires ne sont que l’émanation de notre propre subjectivité, attribuant ceci à l’analyse du dualisme Kantien du Phenomenon, apparence, et du Noumenon, la chose réelle.
C’est ce dualisme Kantien que je vous propose de passer en
revu dans un prochain chapitre consacré au grand philosophe allemand, non sans
avoir expliqué au préalable l’Idéalisme en tant que théorie.
Prochain article :
Idéalisme & Matérialisme, les deux théories qui s’affrontent
Herbert
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