mercredi 13 mars 2013

Qu’en pensent les philosophes modernes ?



Dans le chapitre consacré aux philosophes anciens j’avais volontairement laissé de côté la théorie métaphysique d’Aristote pour une raison simple : malgré sa grande influence sur les théories des philosophes modernes, elle ne présente que peu d’intérêt eu égard au but poursuivi ici, à savoir définir la Conscience.

 Aristote disait : "L'âme n'est pas une variété du corps…, mais elle ne saurait être sans un corps. L’âme n'est pas un corps, mais quelque chose qui appartient ou qui est relatif à un corps."

En ce sens que l’âme étant la "forme" et la matière le "corps physique", le sujet animé est une forme plongée et engagée dans la matière comme toutes ses actions et passions. Chacune a son côté formel (notion de forme) qui concerne l’âme, et son côté matériel qui concerne le corps. Tout ceci me semble confus et n’aboutit qu’à nous faire entrevoir un schéma simpliste de l’âme, entité incomplète qu’il appela le "Noûs", donnant sa forme à la matière, moulant ainsi le corps physique, mais ne pouvant être ni indépendante ni autonome.

Le fait est que c’est bien curieux qu’aucun des philosophes anciens n’ait jamais défini la notion de conscience, ou même tenté de le faire. Dans leurs enseignements, Ils ont tous tourné autour du pot, la qualifiant de puissance et d’énergie, la confondant avec l’âme, un concept religieux, mais sans jamais l’expliquer alors même qu’ils étaient prolixes dans leurs descriptions de la matière. Ils ont tous simplement éludé la question de la conscience comme si c’était un obstacle intellectuel insurmontable, comme si c’était absurde de la poser.

Francis Bacon (1561-1626) et René Descartes (1596-1650), sont généralement considérés comme têtes de liste des philosophes modernes. Francis Bacon soutient que la philosophie a pour objets : Dieu, l'homme et la nature, et de ce fait (dieu étant l’explication de tout) il s’intéresse peu à la métaphasique et ne nous apporte rien dans cette quête que nous poursuivant sur ce qu’est la conscience.

René Descartes, bien qu’ayant développé son discours de la méthode en plagiant le soufisme du philosophe arabe El Ghazali, son ainé de cinq siècle, a tout de même apporté à l’occident qui sortait à peine de la barbarie du moyen âge, un début de construction épistémologique sur la théorie de la connaissance et contrairement à Bacon, s’était intéressé à plusieurs domaines scientifiques dont les mathématiques, la physique, la cosmologie et la physiologie qui lui avait permis d’acquérir de bonnes connaissances en anatomies animale et humaine. De là l'assise de sa notoriété. 

Tous le 17ème siècle fut sous l’influence du cartésianisme de René Descartes et de ses disciples, Bossuet, Malebranche, Spinoza et Leibniz. Le Français Malebranche, le Néerlandais Spinoza  et l'Allemand Leibniz  ont tous les trois poussé la théorie philosophique de Descartes pour l'amener vers d'autres horizons que Descartes lui-même n'avait probablement pas voulu explorer. Si le premier et le deuxième se perdent dans des conjectures et dans des affirmations sur l'existence d'un dieu unique, omniprésent et omnipotent , sans le moindre fondement logique, se prenant parfois les pieds dans le tapis quand à l'existence d'un libre arbitre qu'ils affirmaient par ailleurs, Leibniz ( 1646-1716), brillant penseur allemand, francophone de surcroît, fut le premier des philosophes modernes à accorder à l'âme/conscience le caractère d’une force intelligente et autonome de dieu, et ce, contrairement à l'essence même de la théorie cartésienne.

Leibniz disait qu’en chaque chose qui existe dans l'univers il y a une force qui tend à penser et à agir. Ces forces sont départagées selon le classique antagonisme du bien et du mal, comme c'est le cas dans la religion Zoroastre des Perses ou encore dans l'enseignement du philosophe Grec Empédocle d'Agrègent. Elle sont conscientes d'elles-mêmes, y compris chez les animaux, et tendent à l'équilibre dans l’univers,  grâce à la coordination bienveillante d'une force supérieure, celle de dieu qui "gère" le tout (bien et mal) en aimant et en préservant ses créatures, les hommes et les animaux.

Par l'affirmation de l'existence d'une conscience autonome de la pensée de dieu et libre de ses propres décisions, la philosophie de Leibniz lui valu de se distinguer parmi ses pairs disciples d'un cartésianisme poussé dans ses derniers retranchements, mais en affirmant que " Tout ce qui existe et tout ce qui se passe est forcément le mieux possible, parce que c’est Dieu qui l’a voulu et qu’il ne se trompe pas.", il a également subi les railleries d'un Voltaire (dans Candide) moqueur de son optimisme et de sa naïve théodicée, mais gagné le secours inattendu d'un Victor Hugo, lui même convaincu que dieu existe et qu'il est bon, dans ces vers restés célèbres :

"Oui peut-être au delà de la sphère des nues,
Au sein de cet azur immobile et dormant,
Peut-être faites-vous des choses inconnues
Où la douleur de l'homme entre comme élément."

John Locke (1632 – 1704) est venu apporter une touche anglaise critiquant l’excès de dogmatisme dans la théorie de Descartes. Dans son "Essay concerning Human Understanding" publié en 1890, le "Voltaire” Anglais, nous fait part de sa théorie métaphysique, assez originale pour son époque mais qui constitue tout de même une curieuse combinaison entre l’idéalisme Kantien et le soufisme d’Al- Ghazali.

Pour lui, l'univers se compose de Dieu, de l'immortelle âme pensante, et de la matière physique qui n’est qu’une extension de la pensée de dieu.  Comprenez par là que la pensée de dieu, énergie par essence, amalgame les atomes pour créer la matière, et c’est ainsi que dieu se trouve présent dans toute création qu’elle soit minérale, végétale ou animale.

La perception que nous avons nous de cette matière physique est entièrement réduite aux sensations directement transmises par elle à nos esprits à travers nos cinq sens. Cependant John Locke  admet que les qualités primaires que l’on attribue à la matière (densité, solidité, opacité…,) lui soient intrinsèques et existeraient en dehors de toute observation consciente.

En revanche les qualités secondaires telles que les couleurs, les sons émis ou le goût, relèveraient, d’après lui,  de l’observateur lui-même. Dans un univers sans systèmes auditifs pour entendre ni de cerveaux pour analyser ce que l’on entend, il n'y aurait pas de sons, ni même de couleurs d'ailleurs, en l’absence même de ce système sophistiqué qu’est la vue,  soutient le Voltaire Anglais. Si toute conscience venait à disparaître de l'Univers, il n’y aurait désormais plus de rouge ni de bleu, plus de chaud ou froid, mais les choses allaient encore être grandes ou petites, rondes ou carrées, solides ou fluides, que l’observateur soit là pour en être conscient ou non.

Il en conclue donc que les qualités secondaires ne sont que l’émanation de notre propre subjectivité, attribuant ceci à l’analyse du dualisme Kantien du Phenomenon, apparence, et du Noumenon, la chose réelle.

C’est ce dualisme Kantien que je vous propose de passer en revu dans un prochain chapitre consacré au grand philosophe allemand, non sans avoir expliqué au préalable l’Idéalisme en tant que théorie.

Prochain article : Idéalisme & Matérialisme, les deux théories qui s’affrontent
Herbert

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Chers lecteurs,
Je compte sur vous pour ne pas me traiter d'ignare ou de crétin uniquement parce que vous n'êtes pas d’accord avec mon texte. Pensez à me relire et à remettre en cause vos propres certitudes, avant de commenter. ceci étant dit vos commentaires sont les bien venus.